ma note
-/5

Futari

nombre de notes: 0nombre de notes: 0nombre de notes: 1nombre de notes: 0nombre de notes: 0nombre de notes: 0nombre de notes: 0nombre de notes: 1nombre de notes: 0nombre de notes: 0

les avis de Cinemasie

1 critiques: 3.75/5

vos avis

1 critiques: 1/5



Xavier Chanoine 3.75 Une belle chronique fantastique
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Une belle chronique fantastique

Devenu rapidement un cinéaste culte aux yeux des amateurs de cinéma japonais dans toute son originalité et sa décadence avec House en 1977, œuvre baroque sous fumette empruntant aussi bien à la littérature horrifique qu’au manga, le cinéaste Obayashi Nobuhiko poursuivi ses travaux d’expérimentation visuelle débutés en 1960 tout au long d’une carrière d’une belle richesse à quelques exceptions près. Avec Futari, cet autre grand cinéaste de l’adolescence (comptant aussi dans ses rangs l’immense Somai Shinji) revient à un style moins clinquant, moins transgressif dans sa plastique, sans doute plus ennuyeuse de précision. Car à ne pas s’y tromper, le film est un modèle de cadrages parfaits et de mise en scène à la douceur très –trop affichée, à l’image de son héroïne principale, Mika, jeune adolescente en pleine période de transition dans sa vie : elle vient de perdre sa grande sœur, Chizuko, modèle pour elle malgré sa grandeur trop souvent affichée jusqu’aux yeux de ses parents. Très douée dans la comédie et la musique, étudiante modèle. A côté, Mika est son double renfermé, timide et introvertie jusque dans sa diction et sa manière de communiquer par le chuchotement. Son personnage marque le spectateur dès l’introduction après un générique en plan fixe sur une des superbes ruelles d’Onomichi, sous la musique pas si inconnue que cela auprès des amateurs de l’œuvre de Hisaishi Joe : Mika, alors enfant, se situe en retrait par rapport à sa sœur arborant ici un large sourire. Le ton est donné. Mais très vite, quelque chose manque, une présence lumineuse se fait attendre. Le spectateur pourra attendre encore longtemps, Chizuko n’est plus de ce monde et l’on saura très vite pourquoi. Le ton est alors à la mélancolie, au doute et à la crainte dans un monde qui ne semble pas si bien convenir que cela à Mika. Vulnérable face au danger extérieur (de l’attaque d’un salaryman pervers à ses premiers émois d’adolescente), son épanouissement n’est pas non plus aidé par une famille qui se décompose peu à peu. Effectivement le père est souvent envoyé en mission, une excuse pour rencontrer sa maîtresse, et la mère très fragile ne semble vivre que dans le passé avec l’image de sa défunte fille.

           vlcsnap-32447.jpg

Alors qu’elle rentre chez elle un soir, Mika se fait agresser par un salaryman déséquilibré. Par magie, une main sortie de nulle part lui indique une pierre afin de se débarrasser des pinces d’un gros crabe dangereux prêt à l’étrangler pour voir ce qui se cache sous sa jupe : elle s’en saisit et assomme le pervers. Elle se rend alors compte que la main qui l’aida n’est autre que celle de sa sœur Chizuko, belle et bien sur Terre pour veiller sur elle tel un ange gardien, belle idée rapprochant une fois de plus la mythologie des esprits dans un contexte de routine. Mais ici point de fantômes ou d’esprits nébuleux, juste un être de chair en la personne de Chizuko comme pour mieux véhiculer sa grâce. Vêtue de ses habits habituels, c’est comme si elle n’avait jamais quitté les lieux afin de soutenir sa petite sœur dans les moments difficiles, elle est prétexte à l’émancipation de Mika d’un point de vue de la mise en scène, elle est actrice sans l’être vraiment, son rôle est d’ailleurs opposé à celui qu’elle avait lorsqu’elle était encore vivante : ici c’est elle qui est dans l’ombre de Mika mais son importance n’en est pas moins légitime, elle conseille sa petite sœur, la rassure, l’écoute, subit. La jeune fille est aussi accompagnée par une amie formidable, rigolote en garçon manqué la tête sur les épaules. Elle représente aussi une sorte de double de Mika, partageant le deuil d’un être cher au travers d’une séquence proprement bouleversante où, après avoir ri et grignoté quelques gâteaux, lui annonce qu’elle vient de perdre son père. En plan séquence, la caméra se rapproche petit à petit de deux amies alors que la discussion démarre dans la joie pour se finir dans la tristesse et les larmes, la caméra s’arrête alors au plus près des corps pour impliquer le spectateur au cœur de la discussion et partager la douleur des deux inséparables. Heureusement tout l’art du cinéaste est de discuter de thèmes graves sans rentrer une seule fois dans la complaisance ou le jugement déplacés, ce qui fait la force du film mais aussi sa faiblesse, c’est bien son extrême délicatesse et pudeur, collant au plus près des émotions des personnages.

           vlcsnap-39464.jpg

Mais si la grande douceur de l’ensemble montre un Obayashi plus apaisé, elle empêche le film de décoller véritablement et le laisse ainsi plongé dans un sentiment de lassitude et de mélancolie sur près de 2h30. Un peu lourd à la digestion malgré la beauté de la chronique adolescente qui est faite ici. Un travail moins sombre que celui de Iwai Shunji dans All About Lily Chou-Chou par exemple bien que tous deux partagent des thèmes récurrents comme le raccrochement à un être (Chizuko contre la chanteuse Lily Chou-Chou) ou un parcours semé d’embuches vers une adolescence plus affirmée au travers des déceptions scolaires, artistiques, sentimentales. A côté, le film distille un érotisme à peine suggéré, entre la séquence du bain manquant d’exposer la poitrine de Mika à plusieurs reprises à l’écran et les nombreux plans sur ses jambes, Obayashi expose à la fois les premiers sentiments amoureux de la jeune femme mais aussi sa prise de conscience qu’elle peut être à présent tout à fait attirante et désirable (avec en écho la tentative de viol du début et la réflexion douteuse de son père qui s’en suit). Beau compromis avec les chroniques adolescentes d’Iwai Shunji ou de Somai Shinji, Futari reste un beau film tendre parfois pimenté d’éclairs de violence (déçue de l’attitude de son père, Mika pensera au meurtre) et d’élans mélodramatiques trouvant de la hauteur grâce à la partition fameuse de Hisaishi offrant au film des nappes musicales dont lui seul a le secret. Il n’évite pas la surenchère mais certains thèmes font mouche et confirment sa belle collaboration avec Obayashi (personne n’oubliera la magie de sa composition pour le très mauvais The Drifting Classroom en 1987). Une autre belle chronique à mettre à l’actif d’un cinéaste qui aura écrit pour le mélodrame adolescent quelques unes de ses plus belles pages.



17 mai 2009
par Xavier Chanoine


info
actions
plus
  • liens
  • série/remake
  • box office
  • récompenses
  • répliques
  • photos
  • bande annonce
  • extrait audio