God is a director
Quelques mots concernant le fabuleux titre de cette petite perle du cinéma indépendant. "Cinta" signifie "Amour" en indonésien (il suffit de parcourir les ¾ des titres des comédies romantiques indonésiennes pour s'en convaincre). "Cina" signifie à la fois "LA Chine" ou "Chinois" et se trouve être le prénom du personnage masculin. LE 3A" du titre réfère à la première lettre du prénom de l'héroïne "Annisa", tandis que le "T" au milieu signifie "Tuhan" = "Dieu"…Or cette lettre "T" séparant les deux êtres, c'est évidemment le Dieu / la religion s'éparant les deux êtres, qui s'aiment, s'opposant à la consommation de leur Amour.
Evidemment, cet Amour contrarié peut sembler curieux dans un pays aussi "libéralisé" que la France…Quoique…Mais en Indonésie, premier pays musulman au monde avec plus de 200 millions d'adeptes, c'est une vraie issue. Les deux jeunes gens sont dans l'impossibilité de s'aimer, sans aucune perspective de pouvoir consommer leur Amour en jour et de pouvoir se marier…A moins que l'un ou l'autre se reconvertit, mais ce qui n'est pas une mince affaire en soi.
Et pourtant les inserts de témoignages de vrais couples ans la vie rappelle que l'Amour peut outrepasser les frontières religieuses; que la religion ne devrait pas être un obstacle à l'Amour, prônant d'ailleurs Amour et Tolérance dans la plupart de ces écrits. A préciser, que tous ces couples ont dû se marier à l'étranger pour être officiellement reconnus…et que leur mariage n'et pas toujours sans heurts, incidence et répercussions à leur retour en Indéonsie.
Quant au film, "Cin(t)a", il s'agit d'une toute petite production d'une jeune réalisatrice venue sur le tard au film. Etudiante en architecture, elle se découvre une passion pour el cinéma en ayant accès à la médiathèque de son université allemande au cours d'un échange scolaire…Elle y découvre les classiques du cinéma, très difficilement visibles dans on pays. De retour dans son pays, elle s'équipe d'une caméra numérique dernier cri et rameute autour d'elle amis et passionnés de cinéma…à l'extérieur de Jakarta !! Autre spécificité de ce film, entièrement tourné dans la ville de Bandung avec un équipement et des talents de là-bas, alors que 99% de la production cinématographique est concentrée sur la seule ville de Jakarta.
Bien que bancal, ce premier film est incroyablement attachant en débordant d'énergie créatrice et de volonté de s'exprimer. Sammaria met tout son cœur dans une histoire que l'on devine très personnelle et proche d'elle. On y entrevoit son précédent amour pour l'architecture dans des cadrages hyper précis et travaillé et dans l'acheminement d'idées bien précises.
Mais on y sent surtout la fougue d'une jeune fille, qui veut en découdre avec la vie. Elle y met pêle-mêle toutes ses idées et influences, en démultipliant les messages subliminaux véhiculés par des T-shirts ("Go dis an architect"…"God is a director"), à parler des incidents politiques, qui lui tiennent à cœur.
L'historie de Cina et Annisa est plus qu'une simple histoire d'amour…C'est une ode à la vie par une jeune génération, qui veut croquer la vie à pleines dents. Et ça fait du bien de voir ça!!!
Sorti sans aucune campagne marketing dans un circuit hyper restreint, le film a quand même réussi à s'imposer comme l'un des titres les plus porteurs pour ses producteurs, obligés de multiplier les copies…même si tout est relatif et que le film flirte avec les 20.000 entrées en fin de carrière, très très loin derrière les mastodontes du genre à atteindre les 500.000 ou millions de spectateurs. En revanche, c'est une réussite indéniable pour le circuit indépendant quasi inexistant en Indonésie.