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Dode's Kaden

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les avis de Cinemasie

5 critiques: 4.1/5

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24 critiques: 3.82/5



drélium 4.5 Un ovni - Une merveille
Ordell Robbie 4.5 Un Kurosawa atypique et formidable
Xavier Chanoine 4.5 Une fable généreuse et emprunte de poésie.
Ghost Dog 3.75 Affreux, sales et méchants ?
MLF 3.25
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Un ovni - Une merveille

C'est lent à démarrer, il se passe pas grand chose, presque rien même. Dès le début, on sent que Dode's kaden est un film très personnel, qui touche au coeur de la sensibilité de Kurosawa. C'est la première fois qu'il traite la couleur, enfin, c'est pas du tout cuit quoi... Et pourtant, en se plongeant dans cet univers de crasse, on y découvre des vies attachantes, des personnages haut en couleurs, des mouvements épurés, des regards perçants. Bref, c'est merveilleux, émouvant, chaud comme un Van Gogh mais aussi froid comme un Basquiat et tortueux comme un Bacon.

Après un début qui se veut déroutant au possible, tout ça se met en place et on retrouve la simplicité et la profondeur de l'humanisme cher à Kurosawa. Merveilleusement beau et sale à la fois, dérangeant, comme un goût amer qui reste longtemps après la fin, une odeur de désespoir, de rêves éteints...

Et puis, je vois pas pourquoi je continue à déblatérer, lisez plutôt le dernier paragraphe de Ghost Dog qui dépeind parfaitement l'attachement à ce petit monde et le trouble obscur qui nous envahit lorsque le mot "fin" arrive. On se raccroche alors tant bien que mal à l'innocence du tram toqué, au rêve que lui réalise, pour tenter d'oublier les espoirs perdus des autres personnages qui vivent, eux, en pleine réalité.

03 juin 2003
par drélium




Un Kurosawa atypique et formidable

Ce film est à la fois un ovni cinématographique et un ovni dans l'oeuvre de Kurosawa. Il se présente comme une successions de saynètes situées dans un bidonville. Ses habitants inventent tous leur monde imaginaire pour échapper à la dureté de leur quotidien. Cela donne des scènes superbes que ne renierait pas un Chaplin: le gamin qui crie dodeskaden (tramway toqué) et conduit un tramway imaginaire, un autre personnage qui marche en agitant le pied gauche, des alcooliques s'échangeant leurs femmes, un clochard construisant pour son fils une maison imaginaire. Il y a aussi une pointe d'autodérision de Kurosawa lorsqu'il montre le gamin percuter en "tramay imaginaire un peintre" et lui faire une leçon de code de la route: Kurosawa, ancien peintre, reconnaît sa difficulté à appréhender le monde des bidonvilles.

Dodeskaden est le premier Kurosawa en couleurs et quelles couleurs: les habitants semblent vouloir compenser la morosité de leur quotidien par des habits, des vêtements, aux couleurs criardes (bleu, rouge, jaune, vert kaki); on retrouve ces couleurs sur les murs des maisons, l'usage sybolique des couleurs est sublime (une femme est éclairée par une lumière jaune fonçé quand elle a encore l'espoir et par une lumière jaune pâle quand elle commence à le perdre). Un autre point important est l'usage des dessins: le gamin a barbouillé les murs de sa maison de dessins de tramway qui représentent ce à quoi la vie se résume pour lui. Un autre point est l'utilisation d'horizons blancs pour résumer l'avenir bouché de ces personnages.La période de canicule décrite dans le film est montrée comme une planète extra-terrestre (ciel rouge orange, sol bleuté). Le final frappe par son pessimisme: la vie continue, les problèmes restent.

Mal compris à sa sortie et pas facile d'accès, ce film trouve sa place dans les réussites majeures de son auteur et vaut bien mieux que sa réputation pas vraiment flatteuse.



04 décembre 2001
par Ordell Robbie




Une fable généreuse et emprunte de poésie.

Dodeskaden dépeint un univers respirant la pauvreté, le malaise même si l'on tente de garder le sourire. Ne jamais dire un mot de trop ou déplacé, ne jamais tenter de rendre une personne triste, au risque de froisser encore plus la sensibilité de cette dernière. Le cadre n'aidant pas. Mais malgré cette pauvreté, les habitants résistent, tentent de vivre à peu près comme n'importe quelle personne plus aisée sur cette Terre. La solution? Toujours avoir quelque chose à se dire, à faire ou à projeter dans l'avenir. La vie ne se résume pas qu'au présent, malgré les difficultés que l'on peut rencontrer en chemin. Chaque "villageois" du bidonville possède sa propre personnalité, son propre vécu. Ici, deux femmes se partagent leur mari torché à l'alcool de riz, un père et son fils imaginent leur future maison. Une maison belle et grande dont ils visualisent la construction. Qu'importe si la couleur ne leur plait pas, ils peuvent la changer à leur guise puisque tout réside dans leur imagination. Un oncle maltraite sa nièce, forcée à travailler jour et nuit, à servir sa femme. Ce personnage froid et alcoolique poussera le vice jusqu'au viol (les sous-entendus par la suite sont extraordinaires). Un homme d'affaire atteint de tic subit la pression de sa grosse femme, guère aimable et serviable, un groupe de bonnes femmes passent leur temps à laver le linge tout en se racontant les potins sur le voisinage, un adolescent un peu bébête se met dans la peau de conducteur de tramway étant donné qu'il ne pourra jamais l'être, sa mère n'ayant guère les moyens de lui offrir quoi que ce soit, etc...

Dodeskaden n'a pas de scénario à proprement parlé. On suit le quotidien des habitants du bidonville. Un quotidien qui, par le biais de projets et de rêves de chacun ne cache hélas pas cette tristesse : la pauvreté règne, un fils ramène les restes du restaurant du coin pour se nourrir, lui et son père. Un homme ayant perdu la raison voudra à tout prix se suicider, avant d'être raisonné par un vieil homme. Ce vieil homme subira le cambriolage d'un voleur guère aisé, mais au lieu de le repousser, ira jusqu'à lui dire où se trouve l'argent et pourra repasser quand il n'en aura plus. Surréaliste. Un film teinté d'humanisme fort, comme d'habitude avec Kurosawa. Ici, il faut continuer à vivre malgré les difficultés que l'on rencontre. La vie ne s'arrête pas quels que soient les moyens que l'on a. Se donner la mort n'est pas une solution, comme le dit très justement le vieillard du film : si l'on se tue, notre entourage se tuera par la suite". Le tramway est le véritable symbole du film. Il démarre avec l'adolescent et arrive à destination à la fin du film, sous un large panorama de dessins de trains gribouillés représentant, qui sait, la liberté. A noter la composition magique de Takemitsu Toru.



03 mars 2006
par Xavier Chanoine




Affreux, sales et méchants ?

Bien avant Short Cuts ou Gummo, KUROSAWA Akira s’était essayé dès 1970 à un genre difficile, à savoir la chronique. Une multitude de personnages, une narration éclatée, des histoires parallèles ou imbriquées les unes dans les autres, Dode’s Kaden finit par brosser un tableau magnifique d’un bidonville japonais. Outre les malentendus à la sortie du film en salles au Japon, le bide populaire de ce dernier repose peut-être aussi sur le fait que les gens n’étaient pas prêts à accepter que dans un pays en plein boom économique et financier, il puisse subsister des personnes en marge de la société, contraints de vivre misérablement aux abords d’une décharge industrielle, au contraire de L’Ange Ivre et Les Bas-Fonds, qui traitent du même sujet mais au lendemain de la guerre, ce qui est tout à fait différent.

Avec 30 ans de recul, Dode’s Kaden nous apparaît comme un témoignage essentiel de la vision humaniste et généreuse de l’humanité selon Kurosawa. Si la présentation des personnages est un peu longue et pousse à se demander où il veut en venir, l’intérêt grandit au fur et à mesure que l’étau narratif se resserre autour de 4 histoires : un père et son fils qui rêvent d’une belle maison, 2 ivrognes échangistes, une femme qui tente de faire pardonner son adultère à son ex-mari, et une jeune fille maltraitée par son oncle. Tous ces destins sont animés par l’espoir et les rêves, sans qu’à aucun moment ils ne se matérialisent. Malgré un ciel souvent représenté par de grands traits de pinceaux de toutes les couleurs, c’est un film sombre et désenchanté. On partage le quotidien de ce village avec un naturel déconcertant, comme si tous ces gens nous étaient familiers depuis longtemps. Il est difficile de les abandonner à leur sort lorsque le mot « fin » apparaît, préférant de loin faire un nouveau tour de tramway imaginaire avec le conducteur simplet.



28 septembre 2002
par Ghost Dog


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