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Horus, prince du soleil

News / A Propos


CONFERENCE DE TAKAHATA ISAO (12/12/2003)

Introduction

affiche originaleC’est dans une petite salle bondée que s’est tenue la conférence de Takahata Isao portant sur le film Horus Prince du Soleil. Avant que le réalisateur japonais ne prenne la parole Ilan Nguyen, co-programmateur du Festival Nouvelles Images du Japon et interprète attitré, a introduit le sujet en donnant quelques indications afin de situer l’importance de Horus dans l’histoire de l’animation japonaise. Ainsi la production du film, quatorzième long métrage du studio Toeï sorti en 1968, s’est étalée sur trois années pour aboutir à une œuvre qualifiée « d’œuvre de la renaissance ». Cette production réunissant de grands noms de l’animation fût un projet initié contre l’avis de la direction du studio, un film voulu par le syndicat des animateurs dont Takahata, Miyazaki, Kotabe, Yazuo et d’autres étaient membres (ndr : certains y ayant occupé des postes à responsabilités). Ce qui distingue Horus des autres productions Toeï de l’époque c’est le public visé, plus âgé que le public traditionnel, et la place prépondérante de la vision du réalisateur dans la mise en scène, chose posée dès le départ à l’étape du storyboard auquel Takahata prit une part active (ce qui était nouveau pour un réalisateur).

La politique

Avant d’aborder le film en tant que tel Takahata est longuement revenu sur les conditions historiques qui prévalaient lors de sa production, reliant ainsi intimement l’œuvre à la façon dont lui et son équipe vécurent leur époque : « (...) en 1968 il existait un sentiment de crise et de danger, c’était l’époque de la guerre du Viêt-Nam et nous avions peur qu’en tant qu’allié le Japon soit entraîné dans cette guerre. (...) Sans m’étendre sur la situation actuelle avec la guerre injustifiable en Irak, menée unilatéralement par les Etats-Unis, il faut quand même constater que la période ressemble à celle de 68. Aujourd’hui, malgré le fait que 80% de la population au Japon soit contre l’engagement de troupes en Irak le pouvoir en place –le PLD (libéral démocrate) qui n’est pourtant pas impopulaire- a décidé de l’envoi d’hommes. (...) Le personnage d’Hilda a été créé avec en tête la situation des soldats américains au Viêt-Nam, elle reflète et est confrontée aux mêmes contradictions intérieures que ces derniers (survie, doute, fierté...) ». (...) Pour nous tout ça était extrêmement douloureux... Ce sont des considérants politiques mais je tenais à en parler car ils étaient présents dans la création de Horus. »

Société et écologie

la fête au villageAprès avoir évoqué la dimension directement politique de son œuvre Takahata s’attache à sa dimension écologique et sociale. « (...) La fin des années 60, l’époque de la Haute Croissance Economique, fût marquée par une modification du rapport des japonais à la nature du fait de l’industrialisation. (...) Le Japon a un rapport historique avec son écologie qu’on pourrait qualifier de Développement Durable. La fin de cette relation commence à la fin des 60’s. Un autre problème lié à l’industrialisation concerne la disparition des communautés humaines dans les campagnes.(...) A travers l’existence des villageois et des scènes de foule dans Horus la question de la communauté y est également illustrée. ( ...) Quant au rapport de l’homme à son environnement ce n’est pas vraiment traité en tant que tel dans le film mais plutôt à travers des éléments symboliques. C’était encore une question qui était pour moi, à l’époque, émergeante... »

Une production difficile

« Pour les gens de ma génération Horus représente un point de départ. La majorité de ceux ayant travaillé sur ce film étaient plutôt jeunes. Mais c’est aussi un film qui a exercé une forte influence sur les générations suivantes même si ça ne s’est pas exprimé en terme de mode ou de tendance. (...) Nous avions notre propre façon de voir les choses par rapport aux objectifs de la Toeï qui voulait un film pour enfant fait selon une recette. Notre ambition sur le plan formel nous a amené au-delà de notre savoir faire de l’époque, ce qui a eu des répercussions sur la production : le planning n’a pas été respecté et nous avons pris du retard. En conséquence il nous a non seulement fallu renoncer à certaines scènes auxquelles nous tenions, mais cela nous a aussi obligé à couper dans le matériau final. On a probablement trop voulu en mettre d’un coup, mais même si on n’a pas rendu justice à tout ce que l’on voulait traiter, il fallait le faire. Revoir ce film aujourd’hui me donne des sueurs froides, me rappelle tout ce à quoi on a du faire face. Ce qui était en jeu se traduisait par un combat permanent avec le studio pour imposer notre vision tout en prenant le temps de résoudre nos problèmes formels. Nous avons manqué de marge, d’aisance sur ce film. (...) Il n’y quasiment pas de rires (ndr- dans Horus), ce qui traduit notre état d’esprit du moment. »

Les enjeux narratifs

Hilda« La plupart des scènes avec des chants –en général de foule- valident notre travail. La qualité du mouvement est là dans ces passages animés par Mrs Kotabe et Miyazaki. (...) Ce qu’il y également d’important pour moi dans Horus réside dans une posture qui consiste à maintenir le spectateur dans sa position (ndr- à distance) et non à le saisir et à l’euphoriser comme dans le travail de Mr Miyazaki. (...) Notre ambition était de raconter une histoire réaliste, crédible, et dans ce cadre créer une certaine distance. (...) Ce qui reste de plus marquant réside dans le personnage principal de Hilda. (...) On a réussi à créer des personnages porteurs d’une dose de complexité et dotés d’une profondeur dans les contrastes psychologiques. (...) Par rapport à la force d’immersion des récits classiques où on se perd dans des constructions emplies de tours de force plus ébouriffants les uns que les autres (on oublie les enjeux pour les sensations, au moyen du montage), il s’agissait pour moi d’établir une forme de continuité, de dégager la cohérence de la mise en scène. Il s’agissait de faire un film en dessin animé. »

L’image

« Horus a été pour moi le moyen d’expérimenter des techniques de mouvements de caméra. D’une certaine façon tout ce que j’ai fait ensuite, sur ce terrain, était déjà dans Horus. Aujourd’hui avec l’infographie tout cela est plus accessible mais dans ce domaine –le dessin, le trait présenté dans une optique cinéma/cadre/caméra- je suis persuadé qu’il reste beaucoup à faire et à obtenir avec les méthodes traditionnelles. » C’est dans la séance des questions que Takhata a poursuivi sur ce thème, éclaircissant par là la question de l’éventuelle influence de Miyazaki sur Horus : (...) « tout ce qui relève des mouvements de caméra est de mon fait, c’est l’intérêt qui est le mien pour le travail de l’espace dans l’animation. (...) Ma relation avec Mr Miyzaki et mes autres compagnons est basée sur une compréhension commune, pas sur une division des tâches. L’interpénétration des styles et des points de vue est donc beaucoup plus complexe. »


Astec - 04 février 2004

2006-03-24 18:55
Ainsi parlait Isao Takahata

Une interview passionnante de TAKAHATA Isao est en ligne sur le site ghibliworld.com consacré à devinez quoi. Effectuée dans le cadre du festival Anima 2006 à Bruxelles, Belgique, elle est en anglais dans le texte et complémentaire à celle disponible en français sur buta-connection.net, site français dédié à ces mêmes studios pour un dialogue cette fois entre l'artiste et des collégiens. Voici ce qu'on peut en retenir :

Lorsqu’on lui parle de son statut d’artiste oeuvrant dans le réel, Isao Takahata démonte la fantasy et ce qu’il appelle même la « fanatasy », selon lui un univers chimérique où les jeunes se complaisent à passer leur temps. Il affirme surtout détester les créations fantastiques aux designs réalistes réduisant d’après lui les limites entre monde réel et (final ?) fantasy, les jeunes abusant de la chose étant enclins à trouver la réalité déprimante. Dans cette continuité il conteste l’aspect pessimiste que certains voient dans son œuvre et cite le final de Pompoko, insistant sur l’assimilation d’une réalité non manichéenne pour mieux encourager la vie et l’espoir qui l’accompagne.

Généreux, Isao Takahata dévoile également dans ces interviews ses travaux en cours sans toutefois promettre d’aboutissement. Il parle d’une histoire épique sur la guerre des seigneurs de clans au 12ème siècle, d’un projet sur les « ainus », une minorité ethnique du nord du Japon parait-il à l’origine du peuple japonais, et après l’avoir déjà fait avec Goshu le violoncelliste il aimerait une nouvelle fois adapter une œuvre de MIYAZAWA Keniji, écrivain décidemment d’actualité puisqu’il est aussi à l’origine du court métrage Night of Taneyamagahara de OGA Kazuo dont nous avons discuté dans d'autres dépêches un peu plus bas. Ces projets étant tous très alléchants, il n'y a plus qu'à espérer...

Interview intégrale et en anglais sur Ghibliworld.com (news du 22/03/06).

Interview intégrale et en français sur buta-connection.net

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