ma note
-/5

moyenne
3.85/5
top 100: #90

Oldboy

nombre de notes: 3nombre de notes: 0nombre de notes: 4nombre de notes: 2nombre de notes: 7nombre de notes: 6nombre de notes: 8nombre de notes: 9nombre de notes: 18nombre de notes: 63

les avis de Cinemasie

11 critiques: 3.2/5

vos avis

109 critiques: 3.99/5



Arno Ching-wan 3.75 Surenchère cyclopéenne
drélium 2.25 Comme son réal. Aussi gonflé que gonflant.
El Topo 1
Ghost Dog 4.75 Pas d’effet sans causes
jeffy 4.5 Et vlan, prenez vous ça !
Junta 1.75 Et pourtant...
Marc G. 1.25 Début intéressent mais caviardé par un fond plus que suspect
Ordell Robbie 3 Le temps (ne) détruit (pas) tout...
Tenebres83 5
Xavier Chanoine 4.25 D'une incroyable maîtrise
Yann K 3.75 Machine de guerre baroque mais trop vaine
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Surenchère cyclopéenne

Un humour noir extrême et une ironie inconcevable repoussent à ce point les limites du cynisme qu'on en arrive à découvrir un film à la fois burlesque, sérieux et grotesque. Quelque chose d'innommable ressort du métrage, et que cela ait été souhaité ou non un malaise est palpable tout du long. L'indicible entoure cette histoire et ces personnages par-delà l'ultime twist et bien après le générique de fin. Certaines révélations sont à ce point odieuses qu'elles en deviennent humainement impossibles à assimiler par notre esprit. Ou comment ouvrir les portes de la folie et s'en créer volontairement une autre, vitale, dans les intarissables contrées du rêves, afin de préserver notre santé mentale. La provocation se transforme en pacte avec Yog-Sothoth : mettre en scène une telle histoire relève de la folie pure.

Un beau jour, on découvrira dans les journaux que Tarantino, Miike et Park Chan-Wook violaient des truies ensemble pour mieux étriper leurs futures progénitures, dans la tristesse et la mauvaise humeur, bouffant cette masse de chair en ricanant devant une caméra complice de leurs snuffs borderline. "De l'assimilation du viol". Vertigineux.



02 juin 2004
par Arno Ching-wan




Comme son réal. Aussi gonflé que gonflant.

Le très maîtrisé et le très surfait se côtoient avec un rare équilibre dans Old Boy. Esthétiquement, le travail est très poussé, la mise en scène se veut (sur)stylisée et colle à l'ambiance glauque mais déjà beaucoup d'effets semblent débités de façon scolaire, trop propres sur eux pour transmettre un véritable parti pris. Les acteurs quant à eux sont souvent remarquables (Choi Min Sik se déchire encore une fois) et portent un scénario qui tente d'atteindre non sans effet choc les cimes de l'inoubliable.... Mais non, ça ne passe pas. Comme dans Sympathy, c'est plutôt le sadisme, le nihilisme, le pessimisme et le choc gratuit d'un Miike ou même d'un Kitano qui semblent bien être le plus important à Park Chan Wook alors que le reste est délaissé, dédaigné, snobé même, mis au second plan tant le monsieur est trop sûre de son effet, trop confiant avec sa seule et unique révélation qu'il a à pondre en deux heures. Le genre de film qui se gargarise d'un twist bien balèze mais qui ne parvient pas à transmettre le plus important, l'émotion brute et non la forte impression (cf Ring, Dark Water et pas mal de Shyamalan aussi, ;), ...). Park Chan Wook a beau vouloir remuer le bulbe, les tripes et les mirettes, rien ne véhicule l'émotion salvatrice. Le coeur reste insensible non sans raison. La scène où Choi Min Sik rampe aux pieds de son tortionnaire est une sorte d'apothéose du sadisme gratuit. Et même si le sujet est extrêmement fort et sensible, au final il ne reste qu'un goût amer. La première partie pause habilement l'ambiance mais reste désespérément lourde et inutilement développée, accompagnée d'une voix off pénible et envahissante. Ah oui, c'est pour bien nous faire sentir le mystère et l'enfermement de 15 ans... Le sentiment est plutôt la désagréable* attente de la suite qui susurre : "attendez, y a un twist de folie, c'est un truc de dingue !"

c'est ça ouais, ben quand ce sera moins vain tu me rappelles. Le coup est bien tenté mais l'odeur de provoc' facile reste la plus forte. Choquer pour retenir l'attention, Park n'a-t-il pas autre chose dans sa besace... N'est pas Peckinpah qui veut. Bon, mais sinon, faut le voir, c'est quand même du Park Chan Wook et son plus abouti, donc c'est gonflé... Mais aussi gonflant.

Quant au prochain remake américain avec Nicolas Cage, j'en rigole d'avance.

* Sentiment que le réalisateur a un vrai talent à faire passer, il faut le reconnaître.



01 février 2005
par drélium




Pas d’effet sans causes

Oldboy est un véritable tourbillon d’images, de musique, de références et de scènes cultes, un tourbillon dans lequel on se laisse entraîner de manière irréversible avec un absolu plaisir, ou que l’on observe d’un œil distant et sceptique sans être pris au jeu le moins du monde. J’ai pour ma part été emporté par le tourbillon de cette intrigue diabolique qui commence comme du Kafka, se continue comme un pur film de vengeance (telle une bête, Choi Min Sik cherche l’auteur et la raison de son enfermement 15 ans durant), avant qu’une deuxième histoire de vengeance vienne s’y imbriquer et ne finisse par avaler la première. Fusion géniale entre la puissance de narration du très bon JSA et la brutalité gratuite de l’exécrable Sympathy for Mr Vengence, Oldoy multiplie les références à des classiques du cinéma de genre tout en les intégrant à son univers particulier et en leur donnant un sens différent : chez Park Chan-Wook, certaines scènes chocs mémorables du 7ème art sont détournées de telle sorte qu’elles aient l’air tout à fait banales : la repentance de Keitel dans Bad Lieutenant reprise dans la scène finale, qui en temps normal aurait ému, est ici accueillie avec un grand éclat de rire par l’ennemi ; l’arrachage des dents de Marathon Man et la main sectionnée dans un paquet cadeau tout droit tirée de Seven sont releguées au rang de vastes blagues, puisque l’homme mutilé rit encore de toutes ses couronnes en or et trouve son crochet très pratique… Le choc ne vient donc pas d’où on l’attend : lorsque Choi Min Sik découvre l’histoire de sa vie dans un livre tiré du même paquet cadeau macabre, on est beaucoup plus éprouvé que lorsqu’il avale à pleine bouche un poulpe vivant, le regard plein de haine et de détermination.

Si Oldboy est probablement l’un des films les plus jubilatoires de l’année au niveau visuel, il n’oublie pas non plus de creuser quelques thèmes riches et plutôt inattendus : la vengeance bien sûr, mais aussi l’importance de la Parole, ainsi que la notion de Bien et de Mal considérée dans toute sa complexité : peut-on se prétendre « Bon » alors que le Bien et le Mal s’affronte à chaque seconde de la vie, et qu’il est si facile de déraper sans en mesurer les conséquences néfastes ? Résultat : une excellente surprise qui justifie parfaitement le Grand Prix du Jury qui lui a été décerné.



21 octobre 2004
par Ghost Dog




Et vlan, prenez vous ça !

Monstrueux, c'est peut-être le premier qualificatif qui me viendrait en tête pour ce film. Et plus que quelques scènes choc, au-delà de la construction habile du scénario, ou de tel autre aspect, c'est l'univers engendré qui est proprement monstrueux, impressionnant d'homogénéité. Tous les aspects du film participent à cette atmosphère, l'interprétation quasi hallucinée de Choi Min-Sik, la photographie qui joue plus sur l'intensité que sur les couleurs, la bande son, le jeu sur la temporalité avec ses histoires parallèles, tout contribue à faire d'Oldboy un film intransigeant dans sa présentation, se suffisant à lui-même et qui ne cherche pas à se justifier d'être ce qu'il est. La maîtrise de Park Chan-Wuk est de faire intervenir tous les éléments à une place qui ne devient leur qu'avec un certain décalage, le puzzle se construisant en nous laissant présentir l'importance des différents éléments, mais en laissant leur potentialité se développer dans la durée. Et cela s'applique aussi bien au contenu scénaristique qu'aux éléments constitutifs comme les thèmes musicaux ou les décors. Le meilleur Park Chan-Wuk a ce jour et donc nécessairement un très grand film.

06 juin 2004
par jeffy




Et pourtant...

Et pourtant je voulais l’aimer ce film.
Et pourtant il avait une excellente réputation et Tarantino (que j’adore) l'avait adoré.
Et pourtant la photo, la direction d’acteur ainsi que certaines scènes sont très bonnes.
Et pourtant le 1er tiers du film est vraiment intrigant.
Et pourtant l’acteur principal est bon.

Malheureusement tout ceci n’est que de l’esbroufe.
Malheureusement plus il y a de révélations, plus le film s’engouffre dans le médiocre.
Malheureusement le tout se veut choquant alors qu’il n’y a rien de tel et qu’au final ça en devient prétentieux.
Et malheureusement la scène où CHOI Min-Sik fait le chien devrait être grande (car l’acteur l’est), elle s’en trouve pitoyable du fait du contexte et qu'on se fout éperdument de ce qui peut lui arriver.

Vous l’aurez facilement compris je n’ai pas du tout aimé Oldboy, le problème provient autant de l’inconsistance du scénario que du fait que le film veut être ce qu’il n’est pas, un film intelligent sur la vengeance. C’est l’exemple parfait que l’excellence technique ne peut rattraper un scénario complètement creux et crétin, un certain maux du cinéma coréen contemporain visiblement (d’après ce que j’en ai vu).
De plus Oldboy est un film qui vieillit très mal dans le temps, plus on y pense et moins on l’aime et comme on doit tout le temps expliquer pourquoi on ne l’aime pas et bien on ne souvient que des aspects négatifs…



31 octobre 2004
par Junta




Le temps (ne) détruit (pas) tout...

Parfois, à trop vouloir faire la chasse au futur grand d'Asie, à trop chercher à repérer les travers susceptibles de ruiner artistiquement un cinéaste sur la durée, on en oublie de juger un film. On oublie aussi que le cinéma n'est pas une science exacte. Des preuves? Element of Crime. Le film d'un cinéaste qui avait su formidablement digérer ses influences formelles mais au scénario en forme de compile cinéphile pseudo-métaphysique. Annonciateur des limites futures de LVT, Element of Crime s'imposait pourtant comme un des grands films d'auteur européens des années 80, un sommet formaliste. A une échelle plus mineure, Oldboy reproduit ce genre de miracle: victime sur la longueur de sa logique de surenchère permanente, il fait pourtant sa petite place au soleil de la série B formaliste.     

Le film emporte ainsi à peu près le morceau durant sa première heure et demie. Cette dernière n’est certes pas exempte de scories: le tape à l’œil du plan séquence jeu vidéo surlignant lourdement la solitude du héros, les plans impossibles finchériens, les transitions de LYNCH du pauvre, un score réussi dont l'utilisation sent le KUBRICK mal digéré, des aphorismes Irréversible(s), des influences littéraires et philosophiques superficiellement digérées, une impression tenace de sadisme calculé. Mais tout cela est plus que rééquilibré par les points forts du film. En premier lieu, une exécution formelle souvent brillante : cadrages mangaesques, plans séquences depalmiens réussis, vrai sens atmosphérique de la photographie, bel usage de la caméra à l'épaule lors d'une baston... Et les interprétations inspirées de KANG Hye-jeong et d’un CHOI Min-sik souvent phénoménal. Le charisme et le travail d'acteur de CHOI Min-sik et le scénario construisent alors un héros dont la seule obsession en se levant le matin est de découvrir les raisons de sa séquestration 15 ans durant. Grâce à des rebondissements bien dosés et à un scénario verouillé de A à Z dans ses moindres détails, le cinéaste mène très bien son jeu du chat et de la souris censé conduire le film à son face à face final. L’humour à froid finchérien fonctionne quant à lui assez bien. Carburant souvent à la citation cinéphile, film de cinéaste n'ayant pas totalement digéré ses influences multiples, Oldboy maintient une heure et demie durant l’équilibre entre cynisme manipulateur et gros sentimentalisme à la coréenne. 

Mais, contrairement à son idole DE PALMA1 qui dans ses meilleurs films hitchcockiens maintient en permanence un équilibre cynisme manipulateur/romantisme exacerbé, PARK Chan-wook n’arrive plus à maintenir l'équilibre cynisme/sentimentalisme lorsque le pot aux roses est révélé. La confrontation finale bascule ainsi totalement dans le cynisme bon marché et la surenchère permanente du film se retourne alors contre lui. Autant l’arrière-goût de sadisme calculé passait durant les trois premiers quarts du film parce que contrebalancé par le mélange sentimentalisme/humour à froid, autant le film se vontrierise une fois annexé par le cynisme rigolard du Bad Guy campé par YOO Ji-Tae. Derrière ce cynisme facile trasparaît à ce moment-là celui du cinéaste. De plus, le scénario sombre dans le ridicule et une certaine noirceur poseuse lorsqu'il s'agit de révéler les ficelles de la manipulation subie par son héros. Ce que suggéraient un peu les deux premiers tiers devient évident : en arpentant les territoires noirs de l'enfermement, de la faute et de la culpabilité, PARK Chan-wook reste en surface de ces thèmes. Malgré les apparences, il est loin de creuser leur contenu humain et émotionnel comme a pu le faire son idole HITCHCOCK. Le film finit alors par gâcher ce qu’il peut avoir de brillant à force de trop en faire. Il est donc autant ce qu'en disent ses admirateurs (visuellement souvent brillant, porté par un CHOI Min-sik exceptionnel, souvent formidablement efficace en tant que manipulation) que ses détracteurs (un film qui reste un peu en surface de son sujet, un précis de philosophie niveau CP, un film qui gâche ses atouts de départ à force de n'être obnubilé que par le désir d'impressionner, un film dont le côté hypercalculé est trop visible pour vraiment convaincre). C'est un faux chef d'oeuvre mais c'est loin d'être un mauvais film. 

Finalement, Oldboy restera avant tout un des films emblématiques du boom coréen des années 2000 et une oeuvre ayant inauguré un certain cinéma coréen à base de recyclage cinéphile au kilomètre, d’influences manga et de soif de virtuosité formelle. Qu’un BONG Joon-ho saura sublimer pendant que son collègue et ami stationne encore dans une voie de garage artistique. Ironie du sort: c'est BONG Joon-ho qui avait fait découvrir à PARK Chan-wook le manga de TSUCHIYA Garon, c'est BONG Joon-ho qui avait joué un rôle de conseiller artistique officieux sur la scène de l'usine de Sympathy for Mr Vengeance.

1 Les points communs avec Obsession sont d’ailleurs légion. SPOILER L’inceste comme élément de la manipulation subie par le héros se retrouve dans les deux films. FIN SPOILER Le Coréen s’emmêle autant les pinceaux que l’Américain dès qu’il s’agit de révéler les ficelles de la manipulation. On pourrait aussi voir dans le mélange de goût du grotesque et d’hyperdramatisation un point commun entre les deux films. Sauf que chez le Coréen ce mélange reste de l’ordre du procédé souvent efficace. Chez l’Américain, il est porté par une vraie sensibilité de cinéaste : du grotesque -de la manipulation et de ses instigateurs- va émerger une forme de romantisme malade.



21 mai 2004
par Ordell Robbie




D'une incroyable maîtrise

Il faut en avoir du cran pour pourrir 15 ans dans une petite pièce sans vraiment comprendre pourquoi. Dae-su en a fait les frais. Alors qu'il mène une petite vie paisible en compagnie de sa femme et sa fille, ce dernier se fait embarquer pour des raisons inconnues, embarqué pour 15 ans dans une cellule spéciale logée en haut d'un gratte-ciel. Qui en est responsable? Mais surtout, pourquoi? Pourquoi lui?

Lors de mon premier visionnage qui remonte à plus d'un an, je n'avais pas aimé. Pourquoi? Peut-être parce que le style de Park Chan-Wook me paraissait trop aléatoire, comme si il filmait le quotidien d'un type enragé, écumant les restaurants de raviolis à la recherche du moindre indice pouvant le mener à son ravisseur. Peut-être n'avais-je pas aimé parce que je ne me sentais jamais vraiment impliqué dans cette histoire de vengeance; après tout la vengeance est un acte comme un autre, à divers degrés de violence. Ici la vengeance fait particulièrement mal, et les protagonistes vont s'en rendre compte rapidement. De plus, l'oeuvre primée à Cannes me paraissait réellement pénible à suivre, au rythme souvent inquiétant. Un an passe, je décide de revoir ce fameux Old Boy dans de bonnes conditions étant maintenant habitué au style de Chan-Wook depuis Sympathy for Mr Vengeance, JSA et son extraordinaire Lady Vengeance, et j'avoue avoir pris un pieds monumental. Deux visions ne sont donc pas de trop pour apprécier pleinement Old Boy à sa juste valeur malgré un fond parfois douteux.

ll y a ce véritable travail de recherche sur la psychologie des personnages, tous plus barrés les uns que les autres en particulier Choi Min-Sik qui trouve là l'unes de ses plus hallucinantes prestations dans la peau d'un homme désabusé qui ne jure plus que par la vengeance la plus primitive. Il y a cette jeune femme, Kang Hye-Jeong, admirable d'ambiguïté et de beauté, mais aussi le génial Yoo Ji-Tae particulièrement cinglé et ricanant de la tristesse des autres que l'on verra entre autre dans le renversant Antarctic Journal, Lady Vengeance et le très beau La femme est l'avenir de l'homme. N'oublions pas le très étrange Kim Byeong-Ok au visage particulier, que l'on verra aussi dans Lady Vengeance, campant un rôle de pasteur douteux. Toute cette joyeuse bande a son mot à dire dans Old Boy et semblent pratiquement tous être logés à la même enseigne (sauf peut-être Byeong-Ok qui fait uniquement office de pantin muet).

Mais ce qui retient l'attention, c'est ce climax désenchanté particulièrement nihiliste. On ne rigole pas dans l'oeuvre de Park Chan-Wook, rien ou presque rien ne prête à sourire, tout juste l'on rie devant les effets de style souvent très originaux (Dae-Su qui brandit un marteau devant son ravisseur avec la trajectoire dessinée en pointillés) ou devant certaines séquences à l'humour typiquement Coréen (l'introduction ou encore la scène du poulpe dévoré vivant). On rie mais l'ensemble accentue encore plus la détresse des personnages. Car toutes ces scènes ont un sens, beaucoup caractérisent le cinéma de Park Chan-Wook de particulièrement déviant et mis en scène avec absurdité, abusant d'effets de styles. Ils n'ont pas totalement tord, simplement en ce qui me concerne je suis réceptif à ce genre de cinéma, fait avant tout pour nous faire rêver, délirer et prendre un pieds monstre devant ce que l'on peut appeler un film cohérent. Tout tient pratiquement debout du début à la fin malgré un fond parfois limite. Mais le cinéaste l'a déjà précisé, ses réalisations dites violentes ne sont que remèdes à la violence en elle-même, véritable vaccin pour nous faire mal, nous dégoûter de tout ceci.

Avec du recul on pardonnera un rythme assez mal contrôlé et vingt dernières minutes qui semblent interminables malgré les saisissantes révélations faites à Dae-Su. Rarement la tension n'aura été aussi incroyable, on en aurait presque de la peine pour ce pauvre homme complètement abattu parce qu'il vient d'apprendre par l'intermédiaire d'un bouquin retraçant sa vie. Un twist aussi couillu que mal venu tant il peut sembler suspect et de mauvais goût, mais encore une fois cela fait partit de l'esprit Old Boy, film coup de poing et hallucinante plongée vers la vengeance réduit à son plus simple statut : faire mal. Les coups font mal, le marteau peut être un outil vraiment dangereux si l'on sait s'en servir à bon escient comme le prouve cet incroyable plan séquence filmé en travelling, techniquement absolument parfait. Mais la parole et la manipulation peut être encore plus dure que les coups, c'est là toute la force d'Old Boy résidant dans son alchimie quasi parfaite entre la violence physique et morale. D'où une seconde vision nécessaire en ce qui me concerne. Un thriller impressionnant aussi bien dans le fond et la forme (bien que je préfère les couleurs saturées de sa suite Lady Vengeance), qu'il est bon de voir plusieurs fois pour l'apprécier à sa juste valeur.



12 novembre 2006
par Xavier Chanoine




Machine de guerre baroque mais trop vaine

Oldboy n’est-il que ce que Tarantino and co aiment (de la baston stylisée, de la performance plein la gueule, une manip’ bien maquillée) ou un vrai grand film qui a manqué de peu la Palme d’Or ? Première qualité, Oldboy n’est pas tiède. Il oscille entre le brûlant et le glacial. Les cinéphiles français le détestent, les filles et les vieux sont choquées, ce qui n’ont jamais vu de film coréen se demandent c’est qui ces malades ? Oldboy est excessif, en tout, tout le temps. Il démarre comme en plein milieu, avec une musique techno tonitruante, et ne laissera jamais une seconde faible, sans idée de mise en scène, quitte à aller dans l’expérimental le plus fou. Le scénario invente l’amour le plus ignoble ou le plus beau possible, selon notre degré de morale.

L’excès devient donc le thème du film. Oldboy est un grand barnum baroque, grotesque, le reflet d’un esprit prêt à vous taper dessus au marteau. Si le cinéphile saoulé le rejette en bloc, dommage, il manque des moments somptueux, notamment ces plans qui n’utilisent qu’une partie de l’écran, rendant les personnages minuscules, écrasés, encore cette idée du monde grotesque.

Mais Park Chan-wook n'a pas voulu faire le tri dans ses idées. Il a trop décoré, surchargé et, à la fin, quelque chose cloche dans son décor de l'appartement du tortionnaire : censé être froid et graphique, il dénote finalement un mauvais goût nouveau riche, toc, comme un décor de bar. On attendait une antre décadente, étrange, pour une fin apocalyptique. On peut aussi regretter que le réalisateur de l'anarchiste Sympathy For Mister Vengeance esquisse pour Oldboy une parabole politique (l’enfermement comme métaphore de la dictature) pour virer in fine dans le pur pathos, comme si quelques convictions avaient été sacrifiées sur l'autel de l'efficacité. Park Chan-wook porte alors fièrement son habit de cinéaste coréen : son Oldboy reste typiquement de Corée du Sud car fataliste et ne craignant pas les pleurs. Toutes les scènes d'actions sont désamorcées par de la musique dramatique. Les combattants sont des pantins, de misérables idiots, Choi Man-sik pousse à son paroxysme la destruction du mâle en cours dans le cinéma de son pays (de Lee Chang Dong à Hong Sang-soo), le scénario est une machine de guerre pour le massacrer. Armé de sa mise en scène surpuissante, couillu jusqu’au débile, peut être juste con, Oldboy devient une folle armada qui vide le corps et la tête, emporte des scories mais il s’en fout, il faut avancer, lutter contre des démons infernaux. Il semblait venir à Cannes pour tuer tout le monde. Son idée du cinéma a quelque chose de terrifiant.



25 mai 2004
par Yann K


achat
info
actions
plus