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Ran

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les avis de Cinemasie

6 critiques: 4.62/5

vos avis

53 critiques: 3.91/5



drélium 4.75 beauté du chaos, maîtrise extrême du maître, parfaitement incontournable.
Ghost Dog 4.75 Le dernier film de samourais de Kurosawa, superbe mais très pessimiste.
jeffy 4 Grandiose
Ordell Robbie 5 un royaume se pourrit et un chef d'oeuvre fleurit
Sonatine 5 Le plus grand Chambara jamaix fait.
Xavier Chanoine 4.25 E tu vivrai nelle terrore...
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Le dernier film de samourais de Kurosawa, superbe mais très pessimiste.

Il y a quelque chose de pourri au royaume des Ichimonji. Hidetoru a bataillé ferme durant toute sa vie, en répandant du sang innocent, en crevant des yeux, en torturant et peut-être même en trahissant, pour pouvoir régner sur un domaine recouvrant 3 châteaux. Mais au moins avait-il l'espoir de cet engrenage de violence se terminerait avec la génération suivante. Ainsi, lorsqu'il rassemble ses 3 fils, Taro, Jiro et Saburo, dans une grande prairie et qu'il leur promet chacun un château puisque lui se retire des affaires, ce vieux fou au physique incomparable a la certitude qu'il a rempli son rôle de père et qu'il vivra une retraite paisible en voyageant de château en château.

Il cède donc ses terres à son aîné Taro. Jiro est d'accord mais le cadet, Saburo, monte sur ses grands chevaux et traite son père de fou et d'inconscient. Ce dernier le répudie; il aurait mieux fait de l'écouter... Car dès lors, Taro va asservir son père, le renvoyer de son château puis s'allier avec Jiro pour envahir avec ses troupes le domaine de Saburo. Dans la bataille, Jiro en profite pour tuer son frère Taro et s'emparer du pouvoir. La veuve de Taro, femme perfide et arriviste (reconnaissable à ses faux sourcils en haut du front), fait du chantage à Jiro et devient sa femme. Mais la résistance s'organise autour de Hidetoru, bien content de pouvoir compter sur Saburo...

Je ne vous en raconte pas plus, mais il est clair que cette tragédie familale à des forts relents de pièce de théâtre à la Shakespeare; ça tombe bien puisque Ran s'inspire très librement du Roi Lear. Mais Kurosawa se sert de cette trame dramatique pour filmer ce qu'il a envie de filmer: la bêtise des hommes, qui cherchent à tout prix la douleur au lieu du bonheur. D'ailleurs, Ran signifie chaos en japonais. Pour ce faire, il se place du côté des Dieux, régulièrement invoqués pendant le film, et contemple ce pitoyable spectacle avec une lucidité qui est la marque des sages. Ainsi, les 2 scènes de batailles inoubliables qui opposent des soldats avec leur bannière accrochées dans le dos et qui font des centaines de morts, sont filmées sans emphase, de manière très détachée. Les hommes tombent comme des mouches, et c'est ridicule. La première scène est quant à elle uniquement musicale, aucun bruitage ni dialogue, et renforce cette idée d'impuissance face à la connerie qui dévore notre espèce.

Pour tout dire, Ran frise la perfection. Kurosawa a choisi un point de vue original et sage, mais il n'a pas oublié le spectacle qui est de chaque instant. Les décors sont extraordinaires (voir la reconstitution des châteaux), les scènes de batailles dantesques, chaque personnage a du caractère et est parfaitement écrit, tout s'enchaîne merveilleusement bien. Bref, on en redemande. Reste que pour retrouver le talent, l'audace et la folie des grandeurs de Kurosawa, il va falloir se lever de bonne heure car il a placé la barre très haut!



20 avril 2001
par Ghost Dog




Grandiose

Ce film se vit comme un tout organique au sein duquel les destins individuels se réalisent sans aucune liberté de choix. Voilà le principal apport shakespirien, Kurosawa se contente d'une mise en image dont la lenteur du développement n'est pas sans rappeler un certain Sergio. Heureusement la photographie du film, par la beauté de plans proposés, soutient le développement sans devenir esthétisante. Un bel exercice de style de la part de M. Kurosawa et au final un monument de tragédie.

29 décembre 2003
par jeffy




un royaume se pourrit et un chef d'oeuvre fleurit

Après le Chateau de l'araignée, Kurosawa nous offre une nouvelle superbe adaptation de Shakespeare. Cette transposition japonaise du Roi Lear est tout bonnement soufflante.

Les repères moraux s'effondrent, un monde est en voie de pourrissement et Kurosawa accompagne sa chute de sa caméra virtuose. Cinq ans ont passé depuis Kagemusha et le pessimisme de Kurosawa semble s'etre radicalisé: si Shingen restait impassible face aux changements du monde, ici aucun des personnages n'est épargné par un univers où le complot et la trahison sont devenus la norme. Et Ran de refléter visuellement ce désastre à coups d'images marquantes: Hidetoru (Tastuya Nakadai) trainant son sabre dans une pièce en feux puis en sortant et descendant un escalier tandis que les soldats s'écartent épouvantés comme à l'apparition d'une créature surgissant des enfers, les plans insistants sur les cadavres dépecés ou ensanglantés, la tete de renard remis à la veuve de Taro, arriviste qui s'introduit dans la cour pour la détruire de l'intérieur, suivi d'un discours affirmant que les renards peuvent prendre la forme d'une femme pour perpétrer leurs méfaits, Hidetoru assailli de visions près du chateau qu'il avait brulé pour s'élever au sommet ou se prosternant devant le cadavre de son fils mort.

Mais Ran est aussi le récit d'une rédemption par la chute. En se retrouvant mis au ban de la société par ses fils, Hidetoru va sombrer dans une folie qui va lui faire revoir et regretter toutes les atrocités qu'il a commises, rencontrer un homme dont il a crevé les yeux mais qui ne ressent pas malgré tout de haine pour lui. Cette rédemption est d'autant plus forte qu'elle se fait dans un monde sans Dieu. Le personnage de l'ancien bouffon du seigneur, qui s'est converti au bouddhisme, se demandera pourquoi Bouddha laisse des atrocités se perpétrer sur terre sans intervenir et ira meme jusqu'à sous-entendre que le spectacle de l'horreur humaine est un divertissement pour les Dieux. Le bouffon qui commente les événements quand il est dans la cour puis quand il soutient Hidetoru joue un role de véritable voix off du film et son ton devient de plus en plus empreint de gravité au fur et à mesure du film. Si, contrairement à Kagemusha, l'interprétation de Nakadai ne se situe que dans un registre pathétique, elle est superbe et nous fait ressentir les éclairs de lucidité comme les accès de folie du vieux patriarche. Son personnage mourra certes fou mais, contrairement au monde qui l'entoure, il mourra en étant changé (et certains diront qu'il vallait mieux qu'il meure que de continuer à vivre dans un monde sans Dieu). Il s'agit d'ailleurs de la seule note humaniste du film, note malheureusement sans lendemain.

La mise en scène de Kurosawa fait écho par son sens de l'ampleur à l'ampleur des batailles et de la perte de repères, du règne de la loi du plus perfide enregistrés par la caméra. Les intérieurs sont filmés comme un décor de tragédie, le film multiplie les plans sur les ciels nuageux et le brouillard a la meme puissance évocatrice que dans les autres jidai geki de l'empereur du cinéma japonais (et mondial). L'utilisation de cordes accentue le caractère tragique de la dévastation du chateau et de la sortie d'Hidetoru d'un chateau en feux. L'horreur du meurtre de l'arriviste veuve de Taro est rendue par un geyser babycartesque se répendant sur un mur et le plan où toute une troupe se retrouve décimée par des soldats maniant l'arme à feu souligne l'aveuglement de chefs militaires envoyant leurs soldats à une mort certaine parce qu'ils se sont jetés sans réfléchir dans l'action.

Avec Ran, Kurosawa offrait une fresque belle mais désespérée, l'oeuvre d'un homme qui ne se reconnaissait plus dans ce qu'était devenu le Japon. Et en offrant au cinéma japonais une nouvelle grande oeuvre il le maintenait à flots en attendant le rebond des années 90. L'empereur régnait sur un royaume aussi délabré que celui des Ichimoji et continuait à ne pas bouger, donc à rester au sommet.



21 mai 2002
par Ordell Robbie




E tu vivrai nelle terrore...

Les films de bataille, de guerre et de chaos sont nombreux. On l'a vu, avec Peter Jackson et ses centaines de trolls numériques. Ici, point d'artifices bâtards et lâches, on veut du goût, du vrai! Kurosawa répond à nos attentes. Fable déchirante, violente et incroyablement pessimiste, Ran est la décadence d'un japon médiéval complètement pourrit par la corruption et le traîtrise. Jamais nous n'aurons vu tels complots et tels retournements de veste, tout juste perceptibles dans les polars nippons des années 70, Fukasaku en tête. Orné d'une réalisation majestueuse, toujours j'aurai préféré l'utilisation du Tohoscope, Ran titille la rétine avec ses batailles hallucinantes, réalistes et sans le moindre effet spécial. Ici, ce sont bien cent chevaux qui galopent, cinq cents mecs en costume de samouraï qui courent tous en ligne telles les légions étrangères d'antan. Oui, Kurosawa a le sens de l'exceptionnel, du grandiose, du "truc" qu'il n'y a pas chez son voisin.

La traîtrise, l'acharnement et le dégoût rendront Mon Seigneur fou, tuera ses fils, fera s'entretuer tout un peuple. Une décadence qui ne prête pas à sourire, dont le regard qu'y porte Kurosawa fait froid dans le dos, en témoigne ce plan final avec le dépliant Buddha, d'une froideur et d'un pessimisme ahurissant.



21 février 2006
par Xavier Chanoine


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