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Le Retour des trois soulards

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les avis de Cinemasie

3 critiques: 3.42/5

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4 critiques: 3.5/5



Ordell Robbie 3.5 Inégal mais drôle et audacieux.
Tenebres83 3.25
Xavier Chanoine 3.5 Approche radicale et audacieuse du racisme
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Approche radicale et audacieuse du racisme

Pas comme les autres, cet Oshima c'est certain. Une nouvelle preuve de l'éclectisme total de l'univers du cinéaste qui aura réussi en cette année 68 à pondre deux oeuvres expérimentales : le superbe Journal d'un voleur de Shinjuku et cet étonnant et pas commun Three Resurrected Drunkards axé principalement sur le racisme nippon envers la minorité coréenne présente sur l'archipel, mais aussi vrai tour de force narratif dans la mesure où le film est découpé comme Syndromes and a Century d'un Apichatpong Weerasethakul en état de grâce. Rappelez-vous, le film du thaïlandais se déroulait en deux parties, la première se situait dans un milieu pauvre et la seconde reprenait à peu de chose près les mêmes personnages et situations dans un cadre cette fois-ci plus développé bien que le doute subsistait au niveau du bouleversement temporel. Mais on s'en fichait, faille spatio-temporelle ou non, le résultat était éclatant. Avec Three Resurrected Drunkards, Oshima use du même principe en doublant la même histoire mais en y apportant cette fois-ci de véritables modifications. La première partie du film montre donc trois adolescents à la plage, mimant la célèbre scène d'exécution d'un ennemi opérée par Nguyen Ngoc Loan sous une chanson débile comme pour créer un contraste entre la gravité du geste et la légèreté du background (le soleil, la mer, la chanson débile), ainsi ces petites crapules vont ensuite comprendre ce qu'est la douleur d'être persécuté par ses propres compatriotes, aveuglés par un racisme de bas étage : les vêtements des ados déposés sur la plage avant de se baigner sont remplacés par des uniformes coréens, un geste anodin qui aura pourtant de véritables répercutions sur la suite des évènements : les jeunes gens dans l'air du temps vont ainsi avoir des problèmes pour acheter des cigarettes (le tenant de la boutique informant la police de la présence de trois garnements, coréens oblige), vont se retrouver face à face avec deux clandestins coréens désireux de les exécuter, vont chercher les ennuis avec une jeune femme et son supposé père pour enfin être exilés en Corée, revenir sur l'archipel et rencontrer de nouveaux soucis.

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Une vraie chasse à l'homme sans fin, personne ne peut savoir clairement ce qui va se passer à moitié de film, et pour cause, Oshima expérimente le retour à la case départ sans gêne aucune. On retrouve donc les mêmes adolescents, le même background de départ et les mêmes personnages. Mais là où Apichatpong reprenait les mêmes personnages dans Syndromes and a Century en modifiant complètement leur comportement, Oshima laisse le soin aux trois garnements de modifier à leur guise le cours des choses. Naturellement, presque inconsciemment, ils sont au courant du danger qui les guette c'est à dire tout le contraire de la première partie : ils vont donc par la force des choses modifier les actions de chacun, tenter d'échapper à la mort qui rode auteur d'eux à chaque coin de rue, un exemple de cette "avance" par rapport aux personnages tiers qui eux se retrouvent comme si le film débutait c'est bien la scène du guet-apens des deux clandestins coréens. Les adolescents vont s'amuser à anticiper chaque phrase et action des deux types menaçants, qui sur le coup, ne vont pas comprendre grand chose de ce qui leur arrive, une ironie pleine de légèreté et de fraîcheur opérée par Oshima, lequel garde pourtant une certaine cohérence avec la première partie du film et un sens critique exacerbé par le côté outré des personnages racistes. Le film développe plusieurs thématiques comme la recherche d'identité (les trois adolescents qui confondent leur propre origine ou qui se plaisent à prononcer haut et fort leurs faux noms coréens), le souvenir de tristes évènements comme ce superbe voyage en train avec en décor de fond des peintures illustrant des scènes de guerre au Vietnam ou encore l'exécution d'un prisonnier ennemi par Nguyen Ngoc Loan, avec un sens de la répétition histoire de bien ancrer les images dans la tête du spectateur et de créer davantage de failles spatio-temporelles pour confondre l'identité des personnages qui à cet instant scandent leurs noms coréens (qui ne sont pas les leurs) alors qu'ils sont, évidemment, japonais.

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La confusion est une constante dans Three Resurrected Drunkards, le cinéaste jouant avec les codes de la répétition sans pour autant faire naître une quelconque linéarité fatigante : le prologue et l'épilogue de chaque partie sont tous deux mis en scène comme un calque, l'on se demanderait même si le cinéaste n'a pas réutilisé exactement les mêmes plans maritimes, mais c'est à vérifier. L'épilogue ayant lieu dans le train diffère quelque peu de l'original mais se permet cette fois-ci de ramener des personnages morts à la vie. La narration est donc libre, sorte de conte tragicomique maîtrisé de bout en bout avec un certain parfum de bis assumé jusqu'au bout, où un Max Pecas rencontrerait Kitano dans un film traitant du racisme anti-coréen avec roublardise comme pour l'ironiser et, dans cette optique, le caricaturer pour mieux le dénoncer. La mise en scène est aussi très particulière, à l'image du montage découpé avec fantaisie, alignant les passages surréalistes avec un vrai sens du grotesque (les vêtements volés par une main sortant du sable, le bain et son décor violet irréaliste, le retour à la vie du "supposé" père de la belle jeune femme, les nombreux changements de vêtements...). Dans cette entreprise de montrer le racisme sous sa forme la plus débile (et bien incarnée par deux clandestins physiquement dérangeants), Oshima a réussi avec Three Resurrected Drunkards à mêler vrai commentaire social et goût prononcé par la liberté de ton pour une peinture d'une jeunesse emprunte de liberté malgré le danger permanent. Et comme pour mieux montrer le vrai visage du Japon d'époque, sa mixité et son authenticité, Oshima se mettra dans la peau d'un journaliste par l'intermédiaire d'une séquence en interviewant brièvement chaque passant rencontré à Tokyo pour leur demander s'ils sont japonais. Contre toute attente, tout le monde est coréen.



23 juillet 2008
par Xavier Chanoine


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