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Yuki et Nina

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les avis de Cinemasie

4 critiques: 3.5/5

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6 critiques: 2.88/5



Aurélien 3.5
François 3.75
Ordell Robbie 3 A hauteur d'enfant.
Xavier Chanoine 3.75 Un beau songe
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Un beau songe

Yuki et Nina, le plus japonais des films français ? Le film du duo Suwa/Girardot n’a pas besoin de scénario très écrit pour exister, ni pour faire valoir son authenticité et sa faculté à mêler imaginaire et réalisme social au sein d’une même œuvre pleine de légèreté et de puissance émotionnelle. Le film a beau être filmé à hauteur d’enfant, se dérouler dans les beaux quartiers de Paris et tenir des propos volontairement naïfs, il dégage suffisamment de force et de cœur pour intéresser et captiver. Cette réussite, on la doit à l’alchimie de deux profils résolument différents, celui de Hippolyte Girardot qui s’essaye à la réalisation et à l’écriture, une première pour cet acteur français, et celui de Suwa Nobuhiro, réalisateur appartenant à la Nouvelle Vague d’auteurs nippons apparue au milieu des années 90 et amateur de toute forme d’improvisation à l’écran (voir Mother). L’improvisation, comme le soulignait Hippolyte Girardot, est récurrente lors des échanges entre Yuki et Nina, rien de plus normal lorsque le film donne la vedette à deux enfants : le cinéma n’est qu’un outil pour raconter une histoire, mais les enfants restent des enfants avec leurs expressions pleine de naïveté et une vision de la vie, du haut de leur 1m20, qui leur est propre. On ne peut pas le leur voler.

Yuki est une petite fille franco-japonaise dont les parents sont sur le point de se séparer définitivement. Sa mère prévoit de partir avec elle au Japon pour s’y installer, malgré le refus de cette dernière. Elle n’a qu’une amie, Nina, petite parisienne au fort caractère. Son père ne comprend pas réellement cette idée saugrenue, pour lui, le Japon c’est un pays de fous. Les deux petites vont donc imaginer tout un tas d’idées pour convaincre les parents de Yuki de se remettre ensemble, mais la question de la séparation n’est pas aussi facile qu’une belle lettre rédigée par les deux enfants, colorée et pleine de gommettes, destinée à les convaincre. Comme tente d’expliquer Jun à sa fille, il est triste de se séparer, mais rester ensemble est sans doute pire. La gamine, du haut de ses yeux d’enfants, a du mal à concevoir une telle idée et à la réception de cette lettre, signée par la fée de l’amour, Jun fondra en larmes. Mais au contraire d’une tombée dans le larmoyant et les bons sentiments, la scène ne mènera à rien de très positif et engagera une conversation avec d’un côté la raison incarnée par la mère et la naïveté par la petite Yuki, le film ne cesse d’ailleurs de confronter au sein d’un même cadre, d’un même lieu, l’enfance et le quotidien délicat des adultes pour une explosion d’émotions attendue, à l’image d’un orage provoqué par un choc de températures contraires.

Mais Yuki et Nina n’est pas qu’une chronique sur l’enfance et le couple, installée dans les beaux quartiers de Paris qu’une sitcom n’aurait pas renié. Il y a une magie enfouie derrière l’image lisse et élégamment photographiée, privilégiant des plans sans coupe pour affirmer l’authenticité et le naturel qui priment sur tout autre facteur. Car c’est en partie par le charisme de Yuki que le film prend régulièrement son envol et provoque le ralliement du spectateur à ses côtés, Nina ne reste qu’une petite fille aimable mais trop insolente. Néanmoins, la fugue qu’elle entreprend dans le dernier tiers la montre sous un jour nouveau, plus délicat et moins fonce-dedans à la manière d’un trente-tonnes lâché sur la Route 66. Elle prend l’initiative de mener la barque, file en compagnie de Yuki vers la maison de son père car toutes deux sont enfants de parents divorcés ou sur le point de l’être, et c’est parti pour l’aventure en forêt, représentant souvent une figure métaphorique de l’évasion. D’ailleurs, au moment où les deux petites se perdent de vue, Yuki se retrouve seule, livrée à elle-même, se frayant un chemin parmi les feuillages ou comment mettre en image son propre parcours initiatique, sa propre manière de grandir par la débrouillardise. Le film basculera à cet instant dans un autre monde, exacerbant s’il était encore nécessaire l’approche fantastique –au sens propre- de son récit : ou comment rappeler également une certaine idée du cinéma de Kawase Naomi et ce rapport très fort entretenu avec la nature et le spirituel.

Yuki et Nina culmine alors vers des sentiers qu’on ne soupçonnait guère, et en quittant Paris, livre une fable encore plus douce et rassurante sur l’avenir de la petite Yuki en compagnie de, qui sait, ses futures amies et une grand-mère plus familière qu’elle n’y paraît. Le spectateur pas tout à fait familier avec ce genre d’audaces narratives, très proches du songe, n’y trouvera qu’un film « superficiel » comme s’offusquait mon voisin de droite durant la projection de Et là-bas quelle heure est-il ? de Tsai Ming-Liang. Il n’y comprend tout simplement rien ou n’est pas encore prêt à comprendre ce style de procédé distordant le temps et l’espace sans prévenir. On ne lui conseillera pas le cinéma de Weerasethakul non plus ou toute autre oeuvre sensorielle. Ce beau portrait de l’enfance n’a rien à voir avec ces comédies US où les mômes finissent par faire réconcilier leurs parents à coups de baguette magique, et dieu merci le happy end n’est pas de la partie. La vie suit logiquement son cours, de manière attendue, comme cette pluie légère s’abattant sur les régions humides et verdoyantes du Japon auquel le film nous y convie, pour un dernier moment entre poésie et magie nébuleuses.



19 juillet 2009
par Xavier Chanoine


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