L’amour est en bas de l’immeuble 
Toshiharu IKEDA n’a pas de temps à perdre. Son film dure à peine plus d’une heure, ce qui implique que l’intrigue doit rapidement se mettre en place : une séance de photos dénudées suite à un quiproquo, un obsédé sexuel, une femme harcelée qui ne sait plus quoi faire pour se débarrasser de cet encombrant inconnu. Cela implique aussi des scènes de sexe softs à enchaînement soutenu : masturbation féminine et masculine saturée de lumière rouge, tentatives de viols - y compris sous la pluie – soulignant la détresse affective et la solitude des 2 personnages dans cette grande ville impersonnelle. Cela implique enfin un dénouement efficace dans la logique de ce qui a été présenté auparavant. 
Vite fait donc, mais aussi plutôt pas mal fait : soumissions, désirs, frustrations, peurs et espérances sont emballées dans une mise en scène inventive qui fait la part belle aux deux acteurs principaux.
Fugace instant violent :
Hall d’un petit hôtel. La tenancière fait des reproches à un jeune homme soupçonné de harcèlement sexuel. L’image se fixe soudain, et superposée à  cette image immobile, d'autres images montrent l’homme sauter sur cette femme irrespectueuse, la secouer, la déshabiller et tenter de la violer pour lui faire passer l’envie de recommencer. Une manière originale de confronter la réalité à l’imagination…
	
 
 Une Femme et des Cordes... 
Début des années 1980, Takashi Ishii s'occupe principalement de ses 
Gekiga et essaie de faire aboutir des projets de films qu'il souhaiterait lui-même réaliser. D'abord un certain "
Butterfly", une sorte de romance dans la lignée des 
Dernier Tango à Paris et autres 
Important, c'est d'Aimer. Une histoire d'amour nihiliste (au Japon, le papillon symbôlise la femme et l'éphémère, donc la mort). Puis "
Double Suicide à Shinjuku", une transposition "
Yakuza-Eïga" de la tragédie de Chikamatsu, d'abord initié avec Noboru Tanaka pour l'
ATG. Mais il écrit aussi un polar baptisé "
A Midsummer Night's Death" (qui reprend quelques éléments de "
Butterfly") où l'on suit la dernière nuit d'un flic infilitré qui sera tué au lever du jour et qui, malgré tout, connaîtra une tendre histoire avec une prostituée. Finalement, il écrira un 4ème 
Angel Guts au cinéma (qui, à partir de l'Opus N°2, n'a plus rien à voir avec le roman graphique éponyme) et fait assurer la réalisation par un de ses meilleurs amis dans le milieu ; Toshiharu Ikeda.
Revenons plusieurs années auparavant, Ikeda qui, à l'origine, ne se destinait pas au cinéma, devient un assistant-réalisateur des plus chevronnés, qui travaille pour les meilleurs (Tatsumi Kumashiro, Toshiya Fujita, Noboru Tanaka sur 
Nami et Kichitarô Negishi). Il accédera à la réalisation avec 
Sukeban Mafia, un 
Pinky Violence* existentialiste, plus proche de Fujita que véritablement des films d'exploitations du début des 70's. Puis, il signe son premier film choc ; 
Sex Hunter sur le duel psychologique entre deux ballerines dans un univers quasi-SM (le film inspirera grandement le fan de cinéma Japonais qu'est Paul Verhoeven pour son 
Showgirls, mais aussi la trame du 
Black Swan de Darren Aronofsky). Il choquera tellement les producteurs (pourtant responsables de films de plus en plus déviants) qu'on lui confiera en guise de punition 
Blue Lagoon, une romance ensoleillée innocente, où il s'imposera quand même malgré tout, via une fin nihiliste. Puis, il tourne donc le 4ème Opus des 
Angel Guts ; 
Red Porno. Et pas dans les meilleures conditions, il fut le savoir...
Car il n'a qu'à peine un mois (pré-production, tournage et post-production tout compris) pour réaliser le film pour une sortie (déjà balisée) le jour de Noël 1981. Résultat, un film extrêmement court (à peine une heure), des accents de métrage baclé, rendant pardoxalement le film plus noir et plus étrange. Dégouté, Ikeda quittera la 
Nikkatsu pour tourner des films plus en phase avec sa personnalité torturée (
La Malédiction du Mont Yudono pour la 
Kadokawa, 
Mermaid Legend pour 
ATG... pour ne revenir à la 
Nikkatsu qu'avec 
Scent of a Spell scénarisé par Ishii, et encore, la compagnie ne fera que le distribuer, le film étant une production 
Director's Company).
Le film n'est des plus faciles d'accès. Pour quelqu'un comme l'auteur de ces lignes qui n'aime pas forcément le SM, on peut dire que la référence la plus évidente est bien Konuma. Les scènes de bondage, qui occupent une bonne du film, sont adressés explicitement aux fans les tordus (les mêmes, qui encensent Konuma et des films comme 
La Femme aux Seins Percés avec la même Jun Izumi - 
brrr - sont ceux qui crachent sur les films d'Hasebe). Le personnage de Muraki, stalker amoureux, est beaucoup plus interéssant dans sa mélancolie. La dernière partie est la meilleure aux yeux de l'auteur de ces lignes, car la plus proche de la littérature graphique d'Ishii (
SPOILER ! : La fin est clairement celle du 
Gekiga éponyme. 
FIN DE SPOILER).
Un 
Best-SM qui a ses qualités (bougrement bien mis-en-scène, malgré les conditions de tournage), mais qui ne peut attirer le réfractaire à ce sous-genre s'il n'y a pas le nom de Takashi ishii dans le générique. D'un point-de vue authentiquement personnel, le moins bon de toute la série.
* Le terme de 
Pinky Violence désigne les films d'actions avec des femmes produits généralement par la 
Toeï (les 
Sukeban, les 
Sasori, les 
Girl Boss...). A ne pas confondre avec le 
Violent Pink qui désignent les films dérangeants sur le Viol de la 
Nikkatsu (les films d'Hasebe, la série des 
Zoom, la tétralogie des 
Violeurs du Métro de Shûji Kataoka).