Un nouveau scénario signé Kaneto Shino qui porte un regard assez sombre  d'un Japon qui passe le cap du boom économique avec beaucoup de dommages  collatéraux. 
Ko Nakahira est en osmose avec cette histoire et  l'inscrit dans la continuité du néo-réalisme en tournant en extérieur et  dans des vrais maison/bars qui ne sont jamais en studio. Rien de figé  pourtant car tout le film est presque entièrement tourné à la grue pour  beaucoup de mouvements de caméra qui refusent la facilité. Il évite  l’exercice de style car sa technique sert à s'enraciner dans la rue tout  en étant purement cinématographique. Les deux univers se complètent  avec brio comme par exemple dans un brillant travelling circulaire de  720° (qui s'élève à la fin du plan) en plein milieu d'un carrefour où  des jeunes tentent de convaincre des automobilistes de les laisser laver  leur voitures. 
Il y a plusieurs moments où le documentaire et  la fiction se télescopent subtilement (on voit même une figurante seins  nus traverser une ruelle pour rentrer son linge le plus naturellement du  monde sans que la caméra ne s'attarde sur ce détail). La dimension  sociale est vraiment une composante majeure du film entre le vieux  vendeur qui n'arrive pas s'adapter aux nouveaux critères commerciaux, la  fille qui devient hôtesse sans scrupule pour payer son loyer, les  arnaques à l'assurance où l'on risque sa vie pour une bouchée de pain,  les salles de billards sordides, les bars miteux qui sentent la crasse  (peinture stupéfiantes où l'on croise araignées, cafards, souris et  pièges à mouches).
Nakahira est à l'aise à chaque moments et son  style de réalisation, à la fois très stylisée et réaliste, fonctionne  vraiment admirablement, réussissant à rendre des parties de billard  palpitantes (avec un travail sur le son intelligent), à rendre touchant  tous ses personnages par touches de nuances (joli portrait tout en  discrétion de la nouvelle compagne du vieux vendeur). On sent qu'il  développe l'approche qu'il avait initié dans 
l'homme à abattre  (et qu'il semble avoir arrêté après ce film).
Il  dessine une tableau vraiment noir et fataliste qui éclate dans les deux  scènes d'accidents en voiture pour flouer l'assurance. Des séquences  longues, aux amples mouvements de grues qui n'en finissent pas de  s'élever, de redescendre, de scruter les distances et les silhouettes  lointaines. On se doute que l'issue sera tragique et on est pas tromper  sur la marchandise (ah ce long travelling arrière sous la pluie qui  réunit tous les personnages).
A noter une séquence de conclusion  étonnante qui nous fait sortir de la ville mais qui reste toujours aussi  impitoyable (Le passage au noir apparaît comme une guillotine).
Une  très grande réussite qui parvient à échapper à une écriture et un style  artificiels. Un dernier mot pour souligner l’interprétation générale de  haut vol.